Découvrez la segmentation interactive : une nouvelle ère pour l'analyse d'images


La 🔗 segmentation d’images consiste à diviser une image en régions significatives afin d’en faciliter l’analyse. Lorsqu’elle est interactive, un humain guide l’algorithme (par exemple, avec des outils d'annotation avancés) pour obtenir une segmentation précise de zones d’intérêt spécifiques. Cette approche permet de segmenter n’importe quel objet, même non prévu par les classes d’un modèle automatique, grâce aux indications de l’utilisateur. Pour préparer des jeux de données, la segmentation interactive s’avère donc précieuse pour combler les lacunes des méthodes entièrement automatiques, en combinant la rapidité de l’IA et l’expertise humaine.
💡 Dans cet article, nous explorons les principes de la segmentation interactive, retraçons l’évolution des techniques (depuis les méthodes à base de règles jusqu’aux réseaux de neurones), présentons ses applications phares (imagerie médicale, édition d’images, robotique, etc.), et discutons les défis actuels ainsi que les perspectives d’avenir de cette technologie.

Principe de la segmentation interactive
La segmentation interactive implique une collaboration homme-machine pour isoler un objet dans une image. L’utilisateur fournit des indications visuelles et l’algorithme de segmentation calcule le ou les masques correspondants. Plusieurs modes d’interaction sont couramment utilisés :
- Points de contrôle : l’utilisateur clique sur quelques pixels en les signalant comme appartenant soit à l’objet cible (points positifs) soit au fond (points négatifs). Le système ajuste alors le masque en conséquence, l’utilisateur pouvant ajouter d’autres points jusqu’à obtenir le résultat souhaité.
- Boîte englobante (🔗 bounding box) : l’utilisateur trace un rectangle approximatif autour de l’objet d’intérêt. L’algorithme segmentera ensuite précisément l’intérieur de cette boîte en distinguant l’objet du fond.
- Scribbles / coups de pinceau : l’utilisateur peint grossièrement des traits sur l’objet à garder et éventuellement sur le fond à exclure. Ces scribbles servent de guide à l’algorithme pour délimiter les zones.
Chaque nouvelle indication de l’utilisateur met à jour la segmentation de façon itérative, jusqu’à isoler correctement l’objet cible. Le grand avantage de cette approche est de lever l’ambiguïté dans les cas complexes : l’humain peut préciser ce que la machine doit segmenter. Par exemple, si plusieurs objets se touchent ou si l’éclairage perturbe la scène, l’utilisateur peut orienter le résultat en quelques clics. Ainsi, la segmentation interactive allie la précision du contrôle humain et la vitesse de calcul des algorithmes, offrant un résultat souvent plus fiable qu’une méthode entièrement automatique (ou entièrement manuelle) sur des images difficiles.
Évolution des techniques de segmentation d’images
La segmentation d’images a beaucoup évolué en quelques décennies, passant de simples méthodes déterministes à des algorithmes d’apprentissage profond très performants. On peut distinguer trois grandes étapes dans cette évolution :
1. Méthodes basées sur des règles (années 1980-1990)
Les premiers procédés de segmentation reposaient sur des critères fixés manuellement par des experts en traitement d’image. Parmi ces techniques classiques, on retrouve par exemple le seuillage (binarisation d’une image en fonction d’un seuil de luminance ou de couleur), la détection de contours (délimitation des objets via leurs bords en examinant les 🔗 gradients de l’image) ou le region growing (regroupement de pixels voisins ayant des caractéristiques similaires). Ces méthodes “à la main” fonctionnent bien dans des cas simples, mais manquent de robustesse dès que 🔗 les scènes sont complexes ou les paramètres de prise de vue variables. Elles doivent souvent être ajustées image par image. Néanmoins, elles ont posé les bases théoriques de la segmentation et restent utilisées pour des besoins simples ou en pré-traitement.
2. Approches fondées sur l’apprentissage automatique (années 2000)
Avec les progrès de l’🔗 apprentissage statistique, les chercheurs ont introduit des modèles capables d’apprendre à 🔗 segmenter à partir de données annotées. Par exemple, des méthodes combinent des descripteurs de pixels (couleur, texture, etc.) et des classifieurs entraînés (SVM, forêts aléatoires…) pour prédire l’étiquette (objet ou fond) de chaque pixel. D’autres techniques, comme les random walks (marches aléatoires) ou les modèles markoviens (MRF/CRF), intègrent des informations de voisinage pour améliorer la cohérence des segments. En segmentation interactive, un algorithme marquant cette époque est le Graph Cut (et son extension GrabCut) qui utilise un modèle de graphe pour séparer interactivement un objet : l’utilisateur initie le processus (par exemple en entourant grossièrement l’objet) et l’algorithme optimise une découpe du graphe image en minimisant un critère de coût. Globalement, ces approches apprennent partiellement des données, ce qui les rend plus adaptatives que les simples règles fixes. Toutefois, leur performance reste limitée par la nécessité de définir manuellement les bonnes caractéristiques à apprendre (handcrafted features), et elles atteignent vite leurs limites sur des images très complexes ou des objets variés.
3. Réseaux de neurones et Deep Learning (années 2010 à nos jours)
La révolution est venue des 🔗 réseaux de neurones convolutifs (CNN) capables d’apprendre automatiquement les caractéristiques pertinentes pour segmenter des images. Des modèles tels que U-Net, Mask R-CNN ou plus récemment 🔗 Segment Anything (SAM) de Meta ont repoussé les frontières en termes de précision et de généralisation. En alimentant ces réseaux avec de grands jeux d’images annotées, ils parviennent à segmenter finement des objets aux formes et aux tailles variées, parfois même dans des conditions d’arrière-plan difficiles. Les techniques modernes mêlent souvent encoder-decoder (pour capturer le contexte global et les détails locaux) et attention multi-échelle, ce qui les rend très efficaces pour distinguer chaque pixel de l’image. De plus, certains modèles récents sont promptables, c’est-à-dire qu’ils acceptent des instructions (points, boîte, texte) en entrée pour segmenter n’importe quelle cible désignée dans l’image. Cela les rend particulièrement adaptés à la segmentation interactive, où un point ou un clic de l’utilisateur peut servir de prompt pour générer instantanément un masque.
Il est important de noter que malgré l’excellence des réseaux de neurones, les méthodes traditionnelles n’ont pas totalement disparu : dans des contextes où les ressources de calcul sont limitées ou les images très simples, un seuillage bien choisi peut suffire. Néanmoins, pour les applications industrielles exigeant robustesse et échelle, ce sont bien les approches à base de Deep Learning qui dominent aujourd’hui la segmentation d’images.
Applications dans différents domaines
La segmentation interactive a des applications variées dès qu’il s’agit d’isoler des objets visuels avec précision. Elle est utilisée tant pour 🔗 annoter des données (création de datasets d’entraînement pour l’IA) que pour des outils destinés aux professionnels ou au grand public. Voici quelques domaines majeurs où elle apporte une valeur ajoutée :
Médecine et imagerie biomédicale

En médecine, la segmentation d’images permet de délimiter des structures anatomiques ou des anomalies (tumeurs, organes, lésions…) sur des examens d’imagerie (IRM, scanner, échographie, etc.). Les méthodes automatiques sont utiles, mais l’intervention d’un spécialiste reste souvent nécessaire pour corriger et affiner les résultats. En effet, analyser manuellement des volumes entiers est extrêmement chronophage et sujet à variations.
La segmentation interactive vient accélérer ce processus : un radiologue peut, par exemple, enclencher une segmentation automatique d’une tumeur puis la corriger en quelques clics si nécessaire, au lieu de la délimiter entièrement à la main. De même, pour la préparation d’une intervention chirurgicale assistée par ordinateur, le chirurgien peut rapidement ajuster la zone cible segmentée (comme un organe à traiter) afin d’obtenir un modèle 3D précis. Grâce à ces outils interactifs, on obtient plus rapidement des découpages fiables des structures d’intérêt, ce qui aide au diagnostic, au plan de traitement ou à la création de guides opératoires personnalisés.
Édition d’images et design graphique

Que ce soit pour la photographie, la publicité ou le design, la segmentation interactive est un outil précieux afin de manipuler des éléments visuels. Un cas d’usage courant est le détourage d’objet (ou background removal) : il s’agit de supprimer l’arrière-plan d’une image pour isoler le sujet (produit, personne, etc.). Des logiciels grand public comme Photoshop intègrent des outils de sélection intelligente (lasso magnétique, baguette magique améliorée, etc.) qui reposent sur des algorithmes de segmentation interactifs : l’utilisateur indique approximativement la zone à conserver, l’outil calcule le contour précis et permet de raffiner en peignant les zones mal détourées.
Aujourd’hui, de nombreux services en ligne proposent de retirer le fond d’une photo en un clic, grâce à l’IA. Cependant, ils prévoient souvent un mode “manuel” pour ajuster le résultat, car l’automatique peut confondre des éléments (par exemple, des cheveux fins avec le fond). La segmentation interactive est également utilisée en réalité augmentée (pour placer dynamiquement un objet ou une personne dans un décor différent) ou pour la colorisation sélective (isoler un élément en couleur sur un fond noir et blanc, etc.). Dans tous ces cas, elle offre un contrôle précis à l’utilisateur tout en l’affranchissant de tracer entièrement les contours à la main.
Robotique, véhicules autonomes et vision industrielle

Les systèmes robotiques et les véhicules autonomes s’appuient largement sur la vision par ordinateur pour comprendre leur environnement. En particulier, la 🔗 segmentation sémantique fournit une compréhension fine de chaque pixel de l’image capturée par la caméra du robot ou de la voiture : elle attribue à chacun une étiquette (véhicule, piéton, route, obstacle, bâtiment…).
Ceci est particulièrement important pour la navigation, car le système doit savoir où est la route, comment distinguer un piéton d’un lampadaire, etc. Dans la plupart des cas, ces segmentations sont effectuées de façon entièrement automatique par des réseaux de neurones entraînés sur des milliers d’images urbaines. Néanmoins, la constitution de ces bases de données d’entraînement fait largement appel à la segmentation interactive : des opérateurs humains annotent manuellement des exemples (images de rue) en utilisant des outils interactifs pour segmenter chaque objet, afin de créer 🔗 des vérités terrain précises pour entraîner les modèles. Par ailleurs, en robotique industrielle, un opérateur peut utiliser la segmentation interactive pour enseigner rapidement à un robot à identifier une pièce particulière parmi d’autres sur une chaîne de montage (en la segmentant sur quelques images, pour générer des exemples).
On voit donc que l’humain intervient soit en amont (pour produire des données annotées de haute qualité) soit éventuellement en supervision (par exemple, un conducteur supervisant un véhicule autonome pourrait corriger en temps réel la détection d’un obstacle ambigu via une interface de segmentation interactive, si de telles fonctionnalités d’assistance existent à l’avenir). Dans tous les cas, la segmentation interactive apporte une assurance qualité et un filet de sécurité dans des domaines (transport, automatisation, robotique) où la fiabilité est primordiale.
Défis actuels et perspectives d’avenir
Malgré ses succès, la segmentation interactive fait face à plusieurs défis. D’une part, il s’agit de réduire toujours plus l’effort utilisateur requis : idéalement, on voudrait segmenter n’importe quel objet en un seul clic ou une seule instruction. Les travaux récents vont dans ce sens avec des modèles de fondation comme Segment Anything Model (SAM) de Meta, capables de générer un masque à partir d’un simple point ou d’une boîte englobante fournie en entrée. Ces modèles très génériques montrent des résultats impressionnants, mais ils ne sont pas infaillibles. Dans la pratique, leurs prédictions nécessitent encore souvent une validation et des corrections humaines. Par exemple, nous notons qu’une annotation produite par SAM n’est pas toujours parfaite et qu’un spécialiste doit la reprendre pour atteindre la qualité requise.
Améliorer la précision du premier coup est donc un enjeu : cela passe par des réseaux plus performants, combinant éventuellement vision et langage (on commence à explorer des modèles pouvant être guidés par une consigne textuelle, du genre "sélectionne le grand arbre à droite de l’image").
D’autre part, il faut adapter la segmentation interactive à de nouveaux types de données. Par exemple, l’imagerie 3D (volumique) ou la vidéo posent des défis supplémentaires : comment un utilisateur peut-il efficacement guider la segmentation dans une séquence temporelle ou un volume ? Des outils doivent être inventés pour propager les corrections dans le temps ou selon les coupes 3D, afin d’éviter à l’humain de tout reprendre image par image. Des pistes de recherche portent sur l’apprentissage continu : un système interactif pourrait apprendre au fur et à mesure des corrections de l’utilisateur, pour éviter de répéter les mêmes erreurs. On parle alors de segmentation interactive adaptative, où le modèle se personnalise aux préférences de l’opérateur ou aux données spécifiques rencontrées.
Un autre défi réside dans l’expérience utilisateur elle-même : rendre l’interface d’annotation la plus intuitive et efficace possible. Il faut par exemple un retour visuel instantané (que l’utilisateur voit en temps réel l’effet de ses clics), des suggestions intelligentes (le système pourrait proposer proactivement de segmenter tel objet si l’utilisateur hésite), et la capacité à annuler ou affiner localement sans tout recommencer. La latence doit être minimale pour permettre une interaction fluide : cela implique d’optimiser les algorithmes (certains travaux récents visent des modèles légers pouvant tourner en temps réel sur CPU.
Malgré ces challenges, les perspectives pour la segmentation interactive sont très prometteuses. Avec l’essor des modèles d’IA toujours plus puissants et généralistes, on peut imaginer des outils capables de "tout segmenter" presque instantanément, ne nécessitant qu’une validation rapide de l’utilisateur. Dans de nombreux domaines professionnels, ces avancées feront gagner un temps précieux aux experts (médecins, ingénieurs, etc.) qui pourront se concentrer sur l’analyse plutôt que sur la préparation fastidieuse des données... même si ces outils ne dispensent en rien de la mise en place d'un processus de labellisation (ou LabelOps) complet et efficace.
En conclusion, la segmentation interactive illustre bien la complémentarité entre l’humain et l’IA : les algorithmes apportent la rapidité d’exécution et la capacité à traiter de larges volumes d’images, tandis que l’expertise humaine garantit la pertinence et la qualité du résultat final. Les efforts de recherche actuels visent à minimiser l’intervention nécessaire sans la supprimer complètement, afin que la décision finale reste entre des mains humaines éclairées. Gageons que dans un futur proche, grâce à l’amélioration continue des modèles et des interfaces, la segmentation interactive deviendra un outil encore plus transparent et puissant, s’intégrant naturellement dans de nombreux workflows sans même que l’on s’en rende compte.
Sources pour aller plus loin
- Pour une introduction générale aux différentes techniques de segmentation d’images, vous pouvez consulter 🔗 cet article d'Innovatiana.
- Le 🔗 blog de Kili Technology détaille quant à lui les principes de la segmentation interactive et ses modalités d’interaction.
- Enfin, pour découvrir le modèle Segment Anything de Meta qui préfigure l’avenir de la segmentation universelle, nous vous suggérons la lecture de 🔗 SAM : tout ce que vous devez savoir.
Bonne exploration !